Le nouveau Règlement (UE) 2023/988 relatif à la sécurité générale des produits (RSGP) est entré en application le 13 décembre 2024 et vient remplacer la directive 2001/95/CE.
La réforme est applicable aux produits mis sur le marché à partir du 13 décembre 2024
Un produit est considéré comme « mis sur le marché » lorsqu’il est mis à disposition pour la première fois sur le marché de l’Union européenne, que ce soit lorsqu’il est cédé au terme de sa fabrication ou suite à son importation. Cette situation intervient, par exemple, lorsqu’un fabricant cède un produit à un distributeur pour la première fois. Il est important de noter que cette notion s’applique à chaque produit individuel, qu’il soit fabriqué en série ou à l’unité, et non à une référence ou un modèle dans son ensemble.
Quels sont les objectifs de la Commission européenne dans le cadre de cette réforme ?
À l’ère de l’économie numérique, la Commission européenne a pour ambition d’adapter le cadre légal aux produits issus des nouvelles technologies, tels que les objets connectés et l’intelligence artificielle, ainsi qu’aux marketplaces. Elle cherche également à renforcer l’efficacité de la surveillance du marché et des procédures de rappel de produits.
Quels enjeux pour votre entreprise ?
Compte tenu de la récente publication de la nouvelle directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux le 18 novembre dernier, il est impératif pour les entreprises de se prémunir contre toute mise en cause à ce titre. Elles doivent également redoubler de vigilance en ce qui concerne la responsabilité pénale de la personne morale et/ou du dirigeant, notamment lorsque le défaut du produit provoque un dommage grave (blessure ou mort). Dans ce contexte, la protection de l’image de votre entreprise et celle de vos marques est également un enjeu majeur.
Enfin, les entreprises risquent désormais de se faire sanctionner au titre du nouvel article L.452-5-1 du Code de la consommation introduit par le RSGP. Ce dernier sanctionne le non-respect des procédures de retrait et de rappel, ainsi que le défaut d’information des consommateurs et des autorités. Il prévoit une amende de 600 000 € et une peine de 5 ans d’emprisonnement, avec une majoration possible jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires annuel moyen, proportionnelle aux avantages tirés du délit.
Ainsi, pour éviter ces risques, il est indispensable de mettre en place des mesures strictes de conformité et de suivi des produits.
Qu’est-ce qu’un produit sûr ?
Un produit est sûr au sens du RSGP lorsque, dans des conditions normales ou raisonnablement prévisibles d’utilisation, il ne présente aucun risque ou seulement un risque minime pour les consommateurs.
Le RSGP prévoit une présomption de conformité lorsque les produits sont conformes aux normes européennes, ou à défaut de telles normes, lorsqu’ils sont conformes aux exigences nationales de l’État membre dans lequel ils sont mis sur le marché.
Quelles sont les principales nouveautés apportées par le RSGP ?
- Remplacement des notions de « producteurs » et « distributeurs » par « les opérateurs économiques »
Le RSGP introduit la notion d’opérateur économique pour une meilleure identification des différents responsables intervenants dans la chaîne d’approvisionnement. Sont ainsi désignés comme opérateurs économiques : le fabricant, le mandataire, l’importateur, le distributeur, le prestataire de services d’exécution des commandes ou toute autre personne physique ou morale soumise à des obligations liées à la fabrication de produits ou à leur mise à disposition sur le marché.
- Renforcement des exigences en matière de traçabilité
Le RSGP institue un système de traçabilité spécifique pour les produits susceptibles de présenter un risque grave, c’est-à-dire lorsque le produit est réputé nécessiter une intervention rapide des autorités de surveillance du marché. Ce système repose sur la collecte et la conservation de données, y compris par des moyens électroniques, afin d’identifier le produit, ses composants et les opérateurs économiques intervenant dans sa chaîne d’approvisionnement. Il prévoit également les modalités d’affichage de ces données.
- De nouveaux critères pour l’évaluation de la sécurité des produits
De nouveaux critères à prendre en compte pour l’évaluation de la sécurité sont introduits par le Règlement :
- Lorsqu’un produit non alimentaire peut être confondu par un enfant avec une denrée alimentaire en raison de ses caractéristiques (forme, couleur, emballage, etc.), augmentant le risque qu’il soit porté à la bouche ou ingéré.
- Lorsqu’un produit destiné aux adultes peut être utilisé par des enfants en raison de son design, de son emballage ou de son apparence.
- Les caractéristiques de cybersécurité appropriées nécessaires pour protéger le produit contre les influences extérieures, lorsqu’elles pourraient avoir une influence sur la sécurité du produit.
- Les fonctionnalités évolutives, d’apprentissage et prédictives du produit
- Des précisions sur l’obligation pour les entreprises de déclarer les accidents aux autorités compétentes
En cas d’accident, l’opérateur économique concerné a l’obligation de le notifier aux autorités compétentes de l’État membre où l’accident s’est produit via le système Safety Business Gateway sans retard injustifié à compter du moment où il a connaissance de l’accident. Le RSGP précise les informations relatives aux produits et au degré de gravité de l’accident qui doivent figurer dans la notification.
- Un renforcement des règles de surveillance du marché
Ce renforcement se manifeste par l’utilisation et l’échange d’informations via le Système d’Alerte Rapide Safety Gate, destiné aux consommateurs, et le point d’accès Safety Business Gateway, réservé aux entreprises. Par ailleurs, des obligations verticales sont imposées aux opérateurs économiques, qui doivent coopérer avec les autorités de surveillance du marché. En effet, ces autorités peuvent demander à tout moment des informations sur les produits auprès des opérateurs économiques, allant de la documentation technique aux informations sur la traçabilité du produit sur une période de 6 à 10 ans.
- Des procédures de rappel/retrait plus efficaces
Le RSGP précise les modalités d’information des consommateurs, en fonction de leur capacité à être identifiés. Cela inclut des obligations de notification directe utilisant les données collectées auprès des consommateurs, ainsi que la diffusion d’avis de rappel ou d’avertissement de sécurité par tous les réseaux de communication disponibles. La Commission européenne a également pris l’initiative d’élaborer un modèle d’avis de rappel (Règlement d’exécution 2024/1435 du 24 mai 2024).
- Modernisation du système d’alerte Safety Gate/Safety Business Gateway
Anciennement connu sous le nom de RAPEX, le système européen de notification des alertes Safety Gate et le portail d’accès Safety Business Gateway ont été modernisés par la Commission pour simplifier la notification des produits dangereux aux autorités et améliorer l’échange d’informations. Le RSGP annonce des modifications à venir du système, qui seront mises en place par des actes d’exécution et des actes délégués de la Commission. À suivre de près !
- Des dispositions spécifiques pour la vente en ligne et les marketplaces
En ce qui concerne la vente en ligne, le RSGP se concentre essentiellement sur l’obligation pour les opérateurs économiques de fournir certaines informations sur leurs offres de produits en ligne. Pour les marketplaces, de nouvelles obligations sont instaurées, telles que l’utilisation de leur statut de plateforme numérique pour transmettre des informations aux consommateurs lorsqu’un produit est rappelé. Cela inclut la nécessité de contacter directement tous les acheteurs du produit concerné et de publier les détails du rappel sur leur site web.
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